C’est le quotidien Mediapart qui le révèle.
De manière très exceptionnelle, la journaliste Pascale Pascariello avait obtenu l’autorisation de réaliser des enregistrements d'audience durant plusieurs mois au Tribunal de Grande Instance de Marseille, pour l’émission « Les pieds sur terre » sur France Culture. Des passages devaient en être diffusés après validation des montages par les autorités judiciaires concernées.
Or, Mediapart rapporte que le 10 février dernier, la journaliste « a assisté à une audience de comparution immédiate, dont les extraits diffusés le 20 février ont fait résonner une justice inhumaine, brutale, déloyale. Visiblement effrayé par l’image qu’il renvoyait de lui-même, le TGI de Marseille a décidé de rompre la convention ».
Quiconque n’est pas un habitué du monde judiciaire, où trop souvent l’inhumanité, la brutalité et la déloyauté ont droit de cité, doit impérativement écouter cet enregistrement que Mediapart met en ligne et dont la presse se fait largement l'écho.
Ce témoignage implacable est proprement terrifiant.
Il suscite chez le démocrate une indignation absolue tant il fait honte à la justice républicaine.
On y découvre des magistrats partiaux, tenant des propos indignes, où la violence le dispute à l’insulte, et ne concédant pas même l’illusion d’un espace symbolique au débat contradictoire.
Mais ce qui choque sans doute le plus dans ce naufrage judiciaire, c’est le silence de l’avocat de la défense face aux débordements inqualifiables des magistrat !
Comment ? Alors que ces derniers dérapent d’une manière scandaleuse, piétinant au lieu d’interroger, insultant le prévenu jusqu’à lui dénier la qualité d’être humain (sic !), pas un cri de révolte ne se fait entendre sur les bancs de la défense ?
Pas une demande solennelle n’est formée pour que les propos indignes soient consignés par le greffier sur les notes d’audience ?
Pas une protestation cinglante ne s’élève face à l’outrage fait par les juges à l’homme qu’ils sont censés juger et à l’institution qu’ils sont censés représenter ?
Et après ces silences stupéfiants, lorsqu’est venu le moment de plaider, rien d’autre qu’un timide propos passant sous complet silence le scandaleux comportement des magistrats ?
L’indignation redouble face à cette robe d’avocat inanimée, elle qui aurait dû être le rempart du Droit face à une justice parodique.
Certes, tout avocat pénaliste sait combien sa mission est difficile et combien il est en revanche facile de prétendre rejouer une audience qu’un confrère a eu à affronter. Tout avocat pénaliste connait également la difficulté que rencontre le jeune avocat commis d’office lorsque la charge qu’il a à assumer pèse trop lourd sur ses épaules.Mais il est des situations dans lesquelles la révolte contre la défense (ou l’absence de défense) s’impose, au nom même de la Défense. Des situations où rien ne peut justifier la désertion des avocats.
Non ! Un avocat pénaliste n’a pas le droit de laisser des magistrats fouler aux pieds le fragile bien commun dont ils sont dépositaires.
Un avocat pénaliste n’a pas le droit de laisser une audience pénale se transformer en tribune de la haine ordinaire.
Un avocat pénaliste doit savoir rappeler au fonctionnaire en robe qui manque à la dignité et à la loyauté qu’il n’est plus ni juge, ni procureur, mais un vulgaire parjure.
N’est-ce pas en effet le serment des magistrats qui prescrit à ces femmes et ces hommes que le Peuple charge de rendre la Justice en son nom, de « bien et fidèlement remplir » leurs fonctions en agissant avec dignité et avec loyauté ?
Dignité !!
A Marseille, en ce triste jour de février 2017, elle avait déserté le prétoire.